Tandis qu’une polémique se déclenche en France autour de l’enseignement de l’arabe à l’école, une polémique qui s’est invitée jusqu’à l’Assemblée nationale, et que les opposants de ce projet l’ont qualifié comme encourageant le communautarisme et le catéchisme islamique, vient M. Jean Druel, théologien français, linguiste et directeur de l’IDEO au Caire, dans une conférence proposée par l’IFAO et tenue à l’Institut Français d’Egypte le 11 novembre 2018, intitulée « La langue arabe, cette belle inconnue », pour nous faire découvrir la relation savante et amoureuse avec la langue arabe, ainsi que sonder ses origines, son évolution et sa diversité.
La plus ancienne inscription de la langue arabe, découverte lors d’une mission archéologique en Arabie Saoudite, fut une version nabatéo-arabe, le premier stade de l’écriture arabe, représentant le nom d’une personne.
Nous avons aussi des traces écrites de l’accadien, du phénicien, etc… qui ont la même racine que l’arabe et des systèmes d’écriture différents. Mais c’est difficile de déterminer dans quelle langue est écrite l’inscription ; puisqu’au premier stade d’une langue, elle ressemble à un embryon qui s’apparente aux autres embryons : les autres langues similaires, selon la métaphore utilisée par Jean Druel. Ensuite, l’arabe a dû s’adapter et se développer.
Il y a deux variantes de l’arabe : la variante écrite et la variante parlée. Nous n’avons pas de preuves concernant comment nous parlions l’arabe avant le XIXe siècle, sauf quelques textes écrits citant des phrases de la langue parlée. C’est intéressant d’étudier comment la variante écrite a influencé la variante parlée et l’inverse si nous avons les sources requises. Il est à noter que les grammairiens ont standardisé l’arabe écrit durant les premiers siècles de l’Islam ; ils ont, ainsi, collecté les formes rares de l’arabe chez les bédouins, qu’on croyait avoir gardé la forme la plus proche de l’origine de la langue arabe. Deux cents ans après, on s’intéressait à apprendre l’arabe aux peuples des pays conquis par les Arabes ; ensuite par enseigner l’arabe aux Arabes.
Nous pouvons diviser l’arabe, quant à son évolution, en arabe classique, moyen et moderne. Un arabe classique standardisé est toujours utilisé ou imité dans les cercles religieux, tandis que l’arabe moderne est utilisé dans les journaux. En revanche, en comparant le journal Al-Ahram et le journal Al Hayat, nous allons trouver, dans chacun, des termes différents.
Il existe, donc, une multiplicité de l’arabe. Il n’y a pas un seul arabe, mais plusieurs, que ce soit à l’oral ou à l’écrit. D’ailleurs, il est tentant de savoir comment l’arabe est prononcé à l’époque de Sîbawayh, ou la différence entre l’arabe d’une des plus anciennes tribus du Yémen et une speakerine à la télévision. Jean Druel ajoute ici : Si on vous parle de l’arabe, vous devez interroger votre interlocuteur sur l’époque concernée, le groupe socio-linguistique, le niveau socio-culturel, etc…
En fait, je partage avec M. Druel son amour pour la langue arabe. Comme il l’a dit, le fait de la persistance de l’écrit à travers les siècles est émerveillant. Dans ce même contexte, je vois que le fait d’enseigner la langue arabe, en France, ou à l’étranger, vise non seulement à rapprocher les étudiants de leurs origines mais de leur faire découvrir la beauté et la diversité de cette langue, qui, faute de temps, n’ont pas été intégralement abordées lors de cette conférence.